Au nom du rock, du riff et de l’île Maurice

La communauté rock est merveilleuse. Mise à terre, elle trouve toujours le moyen de se relever.

· 3 min read
Au nom du rock, du riff et de l’île Maurice

“C’est donc ça, vivre dans une île”.

La réflexion est venue instinctivement sur le bord de mer du Barachois de St-Denis, à La Réunion. Inspirée sans doute par la barquette au sivé de lièvre, dégustée au rhytme du chant des vagues, en regardant s’amuser la petite dans le jardin d’enfants… au clair de lune.

Liberté. Le sentiment s’accentue au vu des multiples fresques et autres graffitis qui subliment la capitale réunionnaise. Là-bas, l’art résonne et se vit, intensément. Une aubaine pour les créatifs et ceux qui s’évadent des maux de ce monde. Rien de tel que de savourer une Bourbon sur les battements du maloya omniprésent. Liberté. Celle que de s’accoutrer comme souhaité. De vivre dans le respect des choix. D’être peuple créole uni malgré les croyances multiples. D’être fier de ne rien posséder, mais de tout avoir. De s’exprimer comme désiré.

Frustration. Que de se dire que le Maytal, concert de rock régional, a été annulé suite à l’intervention de la police. Les raisons derrière importent peu au vu des retombées catastrophiques qu’une telle interdiction a sur l’île - dont les échos révoltent l’île soeur.

L’évènement avait été annoncé en marge de l’Underground Festival, unique plate-forme fédératrice de la scène rock mauricienne. Qui revit ainsi de ses cendres dans un océan Indien déjà florissant de multiples formes de rock.

Pour comprendre, ce genre musical se veut anti-système. Et fièrement rebelle. Ceux qui le portent se drapent de cette identité reflet d’un sombre présent. Ainsi se soumettent-ils à la babanisation de leur être. Pour exorciser. En se déchainant sous diverses formes. En se délivrant, pour de vrai.

Deep down, les rockeurs sont intimement sensibles aux peines d’autrui. Ils ressentent, réfléchissent, tentent difficilement de s’éloigner. D’oublier. De taire ces voix assourdissantes qui hantent leur pensées. Ils s’inquiètent des démons, des vrais. Cette musique “enragée” se présente dès lors comme méditative. Libératrice.

Oui, il est frustrant de n’avoir pu vivre cela, au Café du Vieux Conseil, en lequel beaucoup d’espoir est placé pour insuffler un peu de couleurs à cette capitale mauricienne morose à la nuit tombée.

Mais par-delà la frustration a jailli l’espoir. La communauté rock est merveilleuse. Mise à terre, elle trouve toujours le moyen de se relever.

La solidarité inter-îles exprimée après l’annulation constitue une lueur d’espoir. Qu’il incombe désormais d’entretenir. Au nom du rock, du riff et de l’île Maurice.

Ce sont les Réunionnais - témoins des obstacles que les mauriciens professionnels du domaine artistique doivent gravir - qui ont mené la fronde. Le maloya a rameuté grâce à ceux attachés aux groupes LomoR et WarField, des géants de l’île soeur.

Désormais, il incombe de se relever. Ankor, pli for.

Au-delà de toute chose, le momentum doit fédérer. D’autant que si la division s’empare peu à peu des couches sociales, la musique, elle, doit se poser comme unificatrice. Et quoi de mieux que la scène rock pour se faire symbole de révolte? Comme elle le fut. Comme elle est destinée à être.Au nom du rock, du riff et de l’île Maurice.